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La Note Inafon - Les changements d’usage et l’apport de la loi Le Meur

Publié le 25/03/25 par Inafon National

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La loi du 19 novembre 2024, dite loi Le Meur, dont l’objectif est la lutte contre les meublés de tourisme et la protection des logements modifie profondément le régime des changements d’usage.

Certes la notion même de changement d’usage soumis à autorisation, reste, au titre de l’article L. 631-7 du code de la construction, le passage d’un usage d’habitation à un autre usage, même si le code du tourisme autorise les maires à instaurer un régime d’autorisation pour des changements entre d’autres usage que l’habitation et les meublés de tourisme (L 324-1-1 IV bis C tourisme). Les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage demeurent également très proches, sauf la possibilité, pour les meublés de tourisme, d’autorisations temporaires qui peuvent être délivrées en nombre limité (Article L 631-7-1 A du CCH).  En revanche quatre innovations importantes doivent être notées.

Tout d’abord, le moment d’appréciation de l’usage d’origine qui était fixé, auparavant, au 1er janvier 1970 s’étend, aujourd’hui, sur une double période, l’une, fixe, du 1er janvier 1970 au 31 décembre 1976, l’autre, glissante, puisqu’elle concerne les 30 dernières années. Au lieu de devoir démontrer qu’un bien était à usage d’habitation au 1er janvier 1970, il suffira désormais de prouver qu’il l’a été à n’importe quel moment au cours de ces 13505 jours (hors années bissextiles) que représentent ces deux périodes. La preuve de l’absence d’habitation devient donc beaucoup plus difficile.

La deuxième nouveauté tient à ce que la loi précise, expressément, que le permis de construire de changement de destination ne peut désormais être considéré comme entraînant changement d’usage que s’il est accompagné d’une autorisation de changement d’usage. Tel n’était pas le cas auparavant, ce qui permettait à la pratique de considérer, souvent, que l’obtention d’un permis entrainant changement de destination modifiait également l’usage du bien. Cette nouvelle contrainte pose la question de son application dans le temps. La faire rétroagir fragiliserait la situation juridique, et donc la valorisation, de nombreux immeubles de bureaux qui pourraient se retrouver, au titre de leur usage, immeubles d’habitation. Mais, dans la mesure où est en cause l’une des conditions d’application de la sanction que constitue l’amende civile prévue par le texte, sa rétroactivité pourrait être considérée comme contraire aux principes constitutionnel d’application de la loi dans le temps des règles relatives aux sanctions.

La troisième innovation concerne la soumission de l'obtention de l'autorisation préalable en vue d'une mise en location de meublés de tourisme à la présentation d’un diagnostic de performance énergétique, dont le niveau, doit être compris entre les classes A et E ou, à compter du 1er janvier 2034, entre les classes A et D (article L 631-10). Elle vise à éviter que des logements trop énergivores ne quittent le secteur du logement traditionnel pour rejoindre celui des meublés de tourisme.

Enfin, la loi permet, au regard du nouvel article L  151-14-1 du code de l’urbanisme, de délimiter, par la procédure de modification simplifiée, dans les zones urbaines ou à urbaniser, des secteurs dans lesquels toutes les constructions nouvelles de logements sont à usage exclusif de résidence principale. Dans ces zones, les nouveaux immeubles construits, réservés exclusivement à l’habitation principale, ne pourront donc être utilisés comme meublés de tourisme et cela sous peine de remise à leur usage sous astreinte ( art L 481-4) et nullité du bail  (art 7h de la loi 89-462 du 6 juillet 1989).

Si l’on ajoute que le régime fiscal, très favorable, des meubles tourisme été sérieusement, remis en cause et que le code de tourisme a été modifié dans le sens d’un durcissement très net de la législation, on ne peut que constater la vigueur de la volonté du législateur dans la lutte contre les meubles tourisme. Il est trop tôt pour en apprécier l’impact réel.  Dans l’immédiat se pose la question de l’application concrète de ces règles qui créent des effets collatéraux indésirables, au regard notamment de la sécurité juridique des immeubles du bureau, laquelle ne doit pas être remise en cause, car tel n’était pas le but du législateur.

Rédigée par Hugues PERINET-MARQUET, Professeur émérite de l'Université Panthéon-Assas

 

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