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La Note Inafon - Locations touristiques de courte durée et destination de l’immeuble soumis au statut de la copropriété

Publié le 27/06/24 par Inafon National

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Locations touristiques de courte durée et destination de l’immeuble soumis au statut de la copropriété : retour sur les 4 jugements récents du tribunal judiciaire de Paris relatifs à la location meublée de tourisme

Le 18 avril 2024, le tribunal judiciaire de Paris a diffusé un communiqué relatant 4 jugements rendus par sa 8ème chambre relatifs à la compatibilité des locations touristiques de courte durée à la destination de l’immeuble soumis au statut de la copropriété.

Dans ces quatre jugements, le tribunal judiciaire de Paris a retenu l’incompatibilité d’une activité de location touristique de courte durée avec la destination d’un immeuble à usage mixte professionnel-habitation.

Le communiqué laisse suggérer que ces jugements n’ont fait qu’appliquer la jurisprudence de la Cour de cassation, en citant notamment un arrêt du 8 mars 2018 par lequel la Haute juridiction a considéré qu’une cour d’appel avait pu souverainement estimer que la location meublée de courte durée, ou même pour de longs séjours, dans des « hôtels studios meublés » avec prestations de services, pouvait être incompatible avec la destination d’un immeuble à usage mixte professionnel-habitation[1].

Il n’est en revanche pas fait état d’un autre arrêt remarqué de la Cour de cassation et beaucoup plus récent, retenant que l’activité de location de courte durée qui n’est accompagnée d’aucune prestation de services accessoires ou seulement de prestations mineures ne revêtant pas le caractère d’un service para-hôtelier, n’était pas de nature commerciale et donc compatible avec la destination d’un immeuble à usage mixte professionnel-habitation[2].

La jurisprudence dégagée par la Cour de cassation semble alors indiquer qu’une activité de location meublée de courte durée est civile par nature et commerciale lorsque des services para-hôteliers lui sont adossés.

Or, s’il est vrai que le tribunal judiciaire de Paris a retenu la nature commerciale de l’activité dans deux affaires au motif que l’appartement était équipé de coffres à clés situés sous la sonnette, et que le loueur utilisait les services d'une entreprise de ménage et prospectait sa clientèle via des sites de location en ligne[3], il s’est borné à considérer dans les deux autres cas que « le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue une activité commerciale »[4] et qu’une « activité de location exclusivement en meublé de tourisme à destination d'une clientèle de passage, (…) et par l'intermédiaire d'une plate-forme en ligne, présente à l'évidence un caractère commercial »[5].

Ainsi, le critère de prestation de services n’est pas systématiquement retenu pour qualifier de commerciale l’activité de location de courte durée et même lorsqu’il y est fait allusion, ce critère n'apparaît pas déterminant. De ce point de vue, ces quatre décisions peuvent s’analyser comme une forme de résistance à la jurisprudence de la Cour de cassation. C'est du moins l'avis d'un certain nombre de commentateurs.

Cela étant, la Cour de cassation a-t-elle véritablement érigé en critère déterminant la prestation de services ? Car si on y regarde de plus près, sa jurisprudence pourrait s’interpréter plus subtilement. En effet, dans les deux cas où elle a reconnu une activité commerciale, il se trouve que la société qui exerçait l’activité de location était elle-même propriétaire des appartements[6] et qu’à l’inverse, quand elle n’a pas reconnu la nature commerciale d’une telle activité, les appartements étaient proposés à la location par une société de gestion pour le compte de propriétaires dont on peut supposer qu’il s’agissait de leurs résidences secondaires.[7]

Lorsque l’on observe que, dans les quatre affaires jugées par le tribunal judiciaire de Paris, les propriétaires n’étaient pas des particuliers qui avaient confié leurs biens en gestion à une société mais des professionnels de la location de meublés de tourisme, il pourrait en être déduit que la jurisprudence de la Cour de cassation a finalement bien été appliquée.

Autrement dit, un propriétaire personne physique qui propose à la location sa résidence principale ou secondaire pour des séjours de courte durée pourrait avoir de bonnes raisons de soutenir que son activité ne revêt pas une nature commerciale incompatible avec la destination d’habitation de l’immeuble, même lorsqu’il en confie la gestion à une société, sous réserve que cette activité reste occasionnelle et ne génère pas de revenus susceptibles de le faire basculer dans un régime fiscal de loueur professionnel.

En tout état de cause, le critère de prestation de services ne saurait être à lui seul satisfaisant. Il n'existe pas de meublés de tourisme décemment offerts à la location sans qu'il ne soit proposé à minima un nettoyage des locaux et la fourniture de linge de maison.

Par Maître Sébastien LAMY-WILLING, Avocat et Docteur en droit.


[1]Cass. 3e civ., 8 mars 2018, n° 14-15.864

[2] Cass. 3e civ., 25 janv. 2024, n° 22-21.455

[3] TJ Paris, 29 févr. 2024, n° 22/02321 ; TJ Paris, 4 avril 2024, n° 22/02674

[4] TJ Paris, 29 févr. 2024, n° 21/03182

[5] TJ Paris, 23 févr. 2024, n° 21/11598

[6] Cass. 3e civ., 8 mars 2018, n° 14-15.864 précité – Cass. 3e civ., 27 févr. 2020, n° 18-14.305

[7] Cass. 3e civ., 25 janv. 2024, n° 22-21.455 précité


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